L’histoire du village de Labeaume n’a pas le caractère exceptionnel que possèdent des villages comme Vogüé ou Balazuc dans lesquels des familles seigneuriales prestigieuses ont laissé de multiples traces au cours des âges. Son passé ressemble à celui de nombreux villages qui, en raison de leur difficulté d’accès, ont vécu dans un grand isolement durant des siècles.
Par contre, Labeaume s’enorgueillit d’un riche passé préhistorique, c’est la commune de France, d’Europe et peut-être du monde ? possédant le plus grand nombre de dolmens : 147 ont déjà été répertoriés sur le plateau, révélant une présence au Néolithique final et au Chalcolithique, il y a environ 4000 à 4500 ans.
C’est aux XIIIe et XIVe siècles que se développe le village
Une première mention « Balma » remonte au XIIIe. La présence d’un château « Castri de Balma » est attestée au XIVe, il n’en subsiste que les fondations et les vestiges d’une tour dénommée « la Tourasse ». Une inscription datée de 1340 insérée dans un mur de l’église prouve son passé médiéval.
Du Moyen Âge au XVIIIe siècle, une série de coseigneurs se succèdent et se partagent les droits seigneuriaux sur la paroisse (les seigneurs de Sampzon, de Joyeuse, de Balazuc… Eux-mêmes vassaux de l’évêque de Viviers).
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, Labeaume relève de la baronnie de Joyeuse, fief de l’illustre maison des Rohan-Soubise. En 1788, un an avant la Révolution, celle-ci vend les droits honorifiques de la baronnie à Cérice de Vogüé. Terres et seigneurie de Labeaume sont également achetées par Jean-Louis de Montravel, receveur des gabelles à Joyeuse. Il se fait alors appeler Tardy de la Baume et après la Révolution, il possède la seconde fortune du département. Une famille « de la Baume », qui réside actuellement dans la Drôme, est la lointaine héritière des seigneurs de Labeaume.
Nous n’avons pas de trace des Guerres de Religion qui ont joué un grand rôle dans la région, en dehors d’une improbable incursion des Camisards en 1706. Pendant la période révolutionnaire, sous la Terreur, en 1793-94, les prêtres réfractaires se cachent, protégés par une population très attachée au catholicisme. Deux d’entre eux, réfugiés à Chapias, sont miraculeusement sauvés : miracle à l’origine de la construction de l’église, de la tour de Chapias (1884) et d’un pèlerinage très suivi jusqu’en 1914. En réalité, les véritables victimes des conséquences de la Révolution sont les républicains. Sous le Directoire, le département est en proie à la chouannerie et les « brigands royalistes » s’en prennent aux acquéreurs de biens nationaux, une de leurs victimes est Charles Tourre, notable de Labeaume.
Prospérité et crises au XIXe siècle
Le début du XIXe siècle est marqué par l’extraordinaire développement de la sériciculture qui marque le passage de la vie en autarcie à l’économie moderne et modifie l’aspect de la commune dont la population était jusque-là concentrée au chef-lieu et aux hameaux. Les habitants s’installent sur toute l’étendue du plateau et y plantent des mûriers pour l’élevage des vers à soie.
La population passe de 760 habitants en 1820 à 1200 en 1850 (alors qu’en 1850, Ruoms n’en a que 1000 !). Cette date correspond à l’apogée de la civilisation paysanne en France.
À partir de 1850, la crise du ver à soie, conjuguée à celle de la vigne (phylloxéra en 1870), met fin à cette prospérité qui fut de courte durée. La grande crue de 1890 détruit les jardins et les cultures. La Guerre de 1914 avec ses 46 morts marque le point ultime du désastre où se conjuguent l’exode rural et la dénatalité. En 1962, la population atteint son niveau le plus bas : 340 habitants. Les écoles ferment. Les maisons désertées tombent en ruine.
Le renouveau dans les années 1970 est le fait du tourisme qui a pour premier effet de remettre en état les habitations rachetées par des Lyonnais, des Parisiens, des Rémois… Puis, l’adduction de l’eau courante et la démocratisation de l’automobile permettent une diffusion importante de la construction individuelle qui se localise essentiellement sur la zone située entre le village et Ruoms. Labeaume est devenu la banlieue de Ruoms.
De vastes campings installés au confluent de l’Ardèche et de la Baume accueillent les vacanciers venant de toute l’Europe. Lors de la saison touristique l’affluence de visiteurs et de baigneurs s’amplifie chaque année.
Une nouvelle vocation culturelle au XXIe siècle
Labeaume a acquis en 1999 le label « village de caractère » et depuis 1996 s’y tient un festival de musique de renom. En avril 2015, l’ouverture de la Caverne du Pont d’Arc, réplique de la Grotte Chauvet, a remis en valeur de façon emblématique le patrimoine archéologique et préhistorique de la région.
C’est grâce à cette richesse exceptionnelle, tant dans le domaine de la préhistoire et des dolmens que celui de l’archéologie, de l’histoire, de l’architecture et des sites naturels, que les associations culturelles comme la nôtre organisent des sorties et des conférences.
Marie-Hélène Balazuc
Photos Omer Arrijs et carte postale ancienne